SOCIAL : « Flash » sur le contrôle de la température corporelle des salariés…

SOCIAL : « Flash » sur le contrôle de la température corporelle des salariés…

Publié le : 17/04/2020 17 avril avr. 04 2020

Longtemps évoquée parmi les mesures de prévention susceptibles de permettre la reprise de l’activité des entreprises dans le contexte pandémique actuel, elle vient de faire « officiellement » son apparition dans les « questions/réponses » consacrées au COVID-19 du Ministère du Travail, de l’Emploi, de la Formation Professionnelle et du Dialogue social.

Le ministère des Solidarités et de la Santé recommandait, dans une note du 16 mars 2020, « aux personnes se trouvant ou revenant d’une zone où circule le virus de surveiller leur température 2 fois par jour et de surveiller l’apparition de symptômes d’infection respiratoire (toux, difficultés à respirer...) ».

Que faire un mois plus tard, alors que l’on connaît l’évolution de la pandémie, que certaines entreprises continuent à travailler et que, pour les autres, l’objectif est de préparer une reprise progressive d’activité ?

A l’heure actuelle, la prise de température quotidienne de tous les individus à l’entrée d’une entreprise ne correspond pas aux recommandations du gouvernement.

Tout d’abord elle n’atteint, prise seule, que partiellement l’objectif visé, puisque la température n’est pas systématiquement observée pour le COVID-19 et qu’elle peut témoigner d’une autre infection.

Ensuite, elle peut apparaître « manifestement excessive » au regard de sa fréquence et de sa généralité, le Code du Travail interdisant en effet d’apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives des restrictions qui ne seraient pas « justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché » 1.

Certes, dans le contexte exceptionnel que nous connaissons, l’atteinte à ces principes pourrait apparaître « justifiée et proportionnée au but recherché », puisqu’il s’agirait non seulement de protéger la santé du salarié et de ses collègues (obligation particulière qui repose sur l’employeur) mais aussi de contribuer à limiter la propagation du virus (obligation plus générale que chacun a évidemment à cœur de remplir).

Mais l’employeur devra alors peser les conséquences d’une telle mise en place : contrôle de l’ensemble des salariés ? un salarié qui refuse le contrôle peut-il (et doit-il) être sanctionné ? Que faire des données personnelles ?

En outre, les autres mesures de prévention (« gestes barrières », limitation des réunions avec présence physique, respect de la « distanciation sociale », fourniture de matériel de protection, …) devront avoir été mises en place et il est probable, en cas de contentieux lié à la mise en place du contrôle systématique de la température corporelle ou à la remise en cause d’une sanction pour ne pas s’y être soumis, que l’employeur doive démontrer non seulement qu’il a mis en place l’arsenal des mesures de précaution, mais aussi qu’elles ne suffisaient pas à écarter le risque.

Au plan formel, une telle décision peut être mise en place par note de service valant adjonction au règlement intérieur 2 (procédure dérogatoire qui autorise une application immédiate des obligations relatives à la santé et à la sécurité avec communication simultanée au secrétaire du comité social et économique, ainsi qu’à l’inspection du travail).

Enfin, des garanties doivent être offertes, notamment :
  • la prise de mesure dans des conditions préservant la dignité,
  • l’information préalable (règlement intérieur, note de service, affichage, diffusion internet) sur les conséquences d’un refus : le salarié est-il sanctionné ? sur la norme de température admise et les conséquences de son dépassement : le salarié peut-il rester dans l’entreprise ? quelle est sa rémunération ?
  • l’absence de collecte des données de température par l’employeur, qui devra se limiter à en prendre connaissance et à en tirer immédiatement toute conséquence utile  3

1- Articles L. 1121-1 et L. 1321-3 du code du travail
2-Article L. 1321-5 du Code du Travail
3-Communiqué de la CNIL du 6 mars 2020, à l’époque relatif à l’interdiction de la collecte systématique et généralisée des informations relatives à la recherche d’éventuels symptômes présentés par un employé mais dont il faut considérer que le contenu est toujours d’actualité.

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